Au temps béni où les révolutionnaires n'avaient pas encore un peu bousculé les choses, la question ne se posait pas. Il y avait un souverain, donc une souveraineté naturelle évidente pour tous et un souverainisme universellement admis et vécu.
Depuis deux siècles les choses ont un peu changé. Des agitateurs qui avaient une idée bien à eux sur le sens des mots liberté, égalité et fraternité ont décidé, avec l'aide de quelques nobles et bourgeois illuminés par des idées nouvelles qui se sont avérées vieilles comme le monde. Ces idées ayant été habillées de modernité et de forts moyens de persuasion, elles finirent par s'imposer non sans avoir éliminé radicalement par raccourcissement les quelques troublions qui ne l'entendaient pas de cette oreille. Le hasard a voulu que le souverain fut au beau milieu de ces troublions. Il fut donc raccourci. La République était née. Elle comptait bien s'imposer et effacer le souvenir du royaume devenu obsolète après plus de mille ans de règne.
Ce grand chamboulement ayant privée la nation de son père, les fils s'entredéchirèrent afin de prendre la place du père. Après quelques années de valses hésitations et quelques troubles un peu partout sur le territoire et aux marches du royaume défunt, un petit bonhomme habile, venant d'une île devenue récemment française, débarqua en métropole pour remettre un peu d'ordre dans la maison. Il s'imposa assez vite comme père de la nation nouvelle. Ses moyens de persuasion, assez éloquents, propagèrent avec un certain succès les idées nouvelles à travers toute l'Europe. Ce fut le retour de l'empire de Charlemagne pour près d'une vingtaine d'années, avec la légitimité et la cohésion sociale en moins.
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